Tout franchement un commentaire, «amour», concernant le plus grand des sentiments, la plus grande des vertus ?

Written by on October 10, 2022

Tout franchement un commentaire, «amour», concernant le plus grand des sentiments, la plus grande des vertus ?

Qu’on ne s’y trompe pas, la langue francaise a herite la d’un mot multiple, votre mot-tiroir, un mot-valise, plein de sous-entendus ainsi que nuances, ou chaque epoque a inscrit ses interrogations et ses certitudes. Dans l’Antiquite https://datingmentor.org/fr/victoria-milan-review/, il fallait une triade – eros, philia et agape –, Afin de deployer l’ensemble des couleurs de l’amour.

«L’eros est l’amour concu comme ardent desir d’etre uni a quelqu’un», souligne Monique Canto-Sperber, philosophe et directrice du Dictionnaire d’ethique ainsi que philosophie morale (PUF).

J’ai philia, elle, designe «une relation empreinte de reciprocite et d’estime mutuelle». Ce terme, souvent traduit avec «amitie», a une portee plus large, ainsi, consiste en une affection qui se caracterise par la volonte d’entretenir avec autrui des rapports ou se manifeste une certaine excellence morale.

«Enfin, l’agape reste l’amour consacre a autrui, mais autrui considere dans sa qualite fondamentale d’etre un humain et un futur. C’est votre sentiment sans attente de reciprocite et d’une certaine facon independant de ce qu’est l’aime.»

DESIR ET JOIE

Comment les Grecs se rapportaient-ils a ces distinctions, quels usages en faisaient-ils ? «Une chose reste sure, les Grecs et les Romains separaient plus fortement que nous ne le faisons le bonheur du desir, repond Paul Veyne, historien de l’Antiquite. Dans l’Antiquite, le plaisir est omnisexe – et cela explique la frequence de l’homosexualite – alors que le desir, lui, choisit 1 sexe.»

L’amitie, de son cote, pouvait y etre ardente. «Les Romains etant capables d’en Realiser une veritable passion, alors que une telle forme d’amitie reste aujourd’hui peu populaire et toujours suspecte d’homosexualite», poursuit l’historien.

L’AMOUR CHRETIEN

Notre terme agape connait une gloire plus tardive. On sait que son usage est connu d’une litterature paienne, on le retrouve dans l’?uvre du philosophe juif hellenise Philon d’Alexandrie (premier siecle avant l’ere chretienne), mais le concept connut une promotion soudaine quand nos auteurs du Nouveau Testament l’adopterent Afin de designer l’amour chretien.

Dans ce contexte, agape – traduit par amour ou charite – designe la vertu des vertus, comme dans l’Hymne a l’amour d’une premiere lettre de Paul aux Corinthiens (chapitre 13) et la premiere epitre de Jean.

AU MOYEN-AGE, L’AMOUR SOUS TOUTES SES FORMES

C’est au XIIe siecle que va surgir le commentaire «amor» Afin de designer l’amour. «Les medievaux ont votre vocabulaire plus pauvre que des Grecs, ils ont “amour” et “charite”, point final», resume Jacques Zink, professionnel en litterature amoureuse du Moyen Age.

Le mot « charite », qui vient du grec, via le latin, s’est promptement specialise Afin de designer l’amour divin et l’amour se manifestant dans les ?uvres, d’ou le sens moderne de «bienfait envers les pauvres» (Petit Robert) qu’il a retourne plus tard. «Cette dichotomie imposee par le vocabulaire complique la tache des medievaux, poursuit Michel Zink. Ils doivent sans cesse rappeler que l’amour recouvre bien, et que la vraie charite, c’est l’amour !»

Dans le vocabulaire, comme dans sa reflexion, le Moyen Age se degote donc dans une tension. «Il reste a Notre fois moyen de l’invention d’une poesie d’la passion amoureuse, de l’eros, ainsi, J’ai premiere epoque chretienne qui reflechit, plus que jamais, via l’amour sous toutes ses formes, y compris l’amour de Dieu et du prochain.»

LE ROMAN D’LA ROSE

Dans ce contexte, les auteurs du Moyen Age n’hesitent gui?re a se servir de le commentaire amor pour qualifier l’amour humain comme l’amour divin. LeRoman de la rose, best-seller du Moyen Age (lire ci-contre), traduit une telle double polarite.

Dans sa premiere part, il est un chant de la passion amoureuse, irrigue par la poesie des troubadours, dont reste celui qui tient la plume, Guillaume de Lorris. Dans la seconde, redigee avec Jean de Mun, un clerc et votre savant, il s’oriente vers une reflexion encyclopedique et theologique qui cherche a rassembler l’article d’une connaissance de l’amour. Au «jardin de Deduit», jardin du bonheur, scene et de foudre initial, fera pendant la «prairie de l’Agneau», paradis final ou l’Amour mene paitre ses elus…

LES QUALITES DE CELUI QUI KIFFE

Les nuances de l’amor medieval se devoilent dans ses usages. On le voit etre distingue d’«amar», l’amour bestial. «L’amor reste le bon amour, l’amour exigeant, qui n’est nullement obligatoirement chaste, mais qui est maitrise et noble», precise Jacques Zink.

Quant a la poesie, dont celle de Chretien de Troyes, elle se plait a des jeux de mots entre le verbe aimer (amer) et ses homophones «amer» («amertume») et «la mer», car le sentiment amoureux est ambivalent, dangereux comme une mer immense et inconnue…

Notre Moyen Age elabore au meme temps libre tout un cors de doctrines precisant les qualites que devra developper celui qui apprecie. Cela vante la «mesure», la maitrise sans dire, ainsi, «le prix» ou le merite. «Il faudrait aimer de facon a ce que i§a augmente la merite, aimer une dame qui possi?de du tarifs, aimer pour avoir soi-meme du prix», explique Jacques Zink.

Il valorise «joi» (nom masculin), la joie, et « joven », la jeunesse. «Joi, c’est a Notre fois le bonheur et l’inquietude de l’amour, precise Jacques Zink. Et joven, c’est une manii?re d’energie, c’est l’elan vital d’une jeunesse. Ce n’est jamais seulement une question biologique mais une question morale. C’est, pourrait-on penser, la facon de vivre une jeunesse.»

L’HISTOIRE OCCIDENTALE DE L’AMOUR

Aujourd’hui, que reste-t-il de cette riche palette de vocabulaire ainsi que concepts ? Trop souvent une simple opposition entre eros et agape, entre l’amour plaisir et l’amour desinteresse, durcie via l’heritage du jansenisme et du puritanisme. Fruit aussi du succes d’un traite philosophique, somme toute recent, Eros et agape (1932), publie en France apres-guerre, qui exerca une profonde influence au sein des milieux philosophiques et ecclesiaux.

Durcissant un difference, Anders Nygren, theologien lutherien suedois, y faisait une confrontation entre eros et agape la cle de lecture de l’histoire occidentale de l’amour, opposant une vision grecque de l’amour, possessive et egocentrique, a une version chretienne, oblative et desinteressee.


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